À mesure que les années passent, les réseaux sociaux se transforment, et cela, au gré des nouvelles générations et des nouveaux usages. Après près de deux décennies d’invasion dans nos vies, voire d’addiction pour certains, les réseaux sociaux semblent être entré dans une nouvelle ère. Finies l’ère du partage tous azimuts et de la course effrénée aux likes ! Place aux interactions plus ciblées et personnelles. En 2025, force est de constater que les aspirations des utilisateurs ont profondément changé, et avec elles leurs habitudes. Aujourd’hui, ces derniers privilégient davantage les espaces plus intimes et spécialisés. On vous explique ce phénomène et comment les plateformes s’adaptent pour répondre à ces nouvelles façons de consommer du contenu sur YouTube, Instagram, TikTok, Whatsapp, etc.
Le repli vers les espaces privés
Le constat est sans appel : les utilisateurs publient de moins en moins sur les espaces publics des réseaux sociaux. Faites le test vous-même. Consultez le compte instagram d’un abonné de la génération Z ou Alpha… Il y a de fortes chances que vous vous retrouviez devant un mur… vide. Adam Mosseri, le patron d’Instagram, reconnaît lui-même ce phénomène :
Vous ne partagez plus beaucoup de moments personnels dans le feed, comme vous le faisiez il y a cinq ou dix ans. Vous les partagez davantage dans les ‘stories’, ou en messages privés.
Cette tendance s’explique par plusieurs facteurs :
- Une prise de conscience des risques liés à la surexposition. Les internautes s’inquiètent davantage de leur droit à l’image, de l’exploitation de leurs données, de la traçabilité de leur discours, des fake images créées par l’IA ou encore de leur sécurité (géolocalisation constante, etc.).
- La fatigue face à la pression sociale du personal branding.
- Le besoin de se protéger du harcèlement et des discours toxiques – les trolls et haters ont la dent dure sur les réseaux sociaux.
Les messageries privées comme WhatsApp, propriété de Meta, connaissent ainsi une croissance fulgurante. Avec plus de deux milliards d’utilisateurs actifs mensuels, WhatsApp s’impose comme le « réseau social privé du futur » selon Mark Zuckerberg.
Une nouvelle application sortie en 2020 a surfé sur cette tendance : BeReal, qui se présente comme l’anti-Instagram. L’idée ? Partager l’instant présent sans retouche à un cercle d’amis restreints. C’est l’application populaire chez les jeunes depuis quelque temps. Y être donne un sentiment d’appartenance à une communauté.
Le principe est simple : une fois par jour, à une heure précise changeant chaque jour, les utilisateurs reçoivent une notification indiquant qu’il est temps de “capturer son BeReal” et qu’ils ont 2 minutes pour le faire. Ce “BeReal” est une photo prise à 360° (caméra avant + caméra arrière) de l’instant présent.
L’émergence des communautés de niche et du “Cozy Web”
Parallèlement au repli vers les espaces privés, on observe un regain d’intérêt pour les communautés spécialisées. Les internautes se tournent vers d’autres plateformes (Whatsapp, Discord, Reddit, Telegram, etc.), des forums de discussions, des blogs niches et des applications dédiées à leurs centres d’intérêt spécifiques : Letterboxd pour les cinéphiles ou Goodreads pour les amateurs de littérature.
Cette tendance reflète un désir de connexions plus authentiques, focalisées sur des sujets qui leur tiennent à cœur ou les passionnent, et avec des personnes partageant les mêmes centres d’intérêt. Tout cela, bien loin du bruit et de la superficialité des grandes plateformes généralistes, où les internautes se rendent davantage pour se divertir que pour interagir.
Ces nouveaux comportements s’inscrivent dans ce que l’essayiste Venkatesh Rao a nommé le « Cozy Web » : un web douillet, où les internautes se retirent de l’activité publique pour diverses raisons, allant de la simple préférence pour les petites communautés à la peur. Ce qui caractérise également le Cosy Web, c’est son retour aux écrits plus longs et aux conversations plus denses, qui en fait un espace plus mesuré, incitant à une réelle réflexion et à des connexions plus profondes. La confiance s’installe alors plus naturellement. Selon Bob Hutchins, l’auteur de l’article ‘The Rise of Cozy Web’,
Le confort en ligne nous incite à approfondir les sujets avec une patience ciblée plutôt que de les survoler anxieusement à la recherche de pics de dopamine.
Les grands réseaux sociaux l’ont bien compris et ont pris les devants.
L’adaptation des géants du web : Entre espaces restreints et algorithmes affûtés
Face à ces changements, les grandes plateformes tentent de s’adapter :
- Meta investit massivement dans ses messageries (Messenger, Instagram et Whatsapp) et les fonctionnalités de conversation de groupes.
- YouTube a annoncé la création de « communities », des espaces de discussion entre fans d’une personnalité
- Snapchat a lancé sa propre page « for you », s’inspirant du modèle TikTok
Cependant, ces efforts soulèvent des questions sur la possible corruption de ces espaces par la monétisation et l’intrusion des annonceurs.
Sur les réseaux sociaux traditionnels, c’est l’algorithme qui est programmé pour personnaliser les contenus affichés.
Une arme à double tranchant… On s’explique.
Pour retenir l’attention des utilisateurs, les plateformes misent de plus en plus sur des algorithmes de recommandation ultra-personnalisés. Si cette stratégie s’avère efficace en termes d’engagement (le temps passé sur Facebook a augmenté de 7% en un an), elle contribue aussi à fragmenter davantage l’expérience en ligne.
Les utilisateurs se retrouvent ainsi enfermés dans des « bulles de filtres », où ils sont exposés principalement à des contenus qui confortent leurs opinions et centres d’intérêt. Cette personnalisation poussée à l’extrême rend de plus en plus difficile l’existence d’un « web commun », accentue les clivages sociaux et politiques, et nourrit le “ doomscrolling ” (défilement morbide) – le fait de faire défiler et donc de consommer excessivement des contenus anxiogènes pouvant créer du stress et une anxiété accrue.
Comment intégrer ces nouveaux usages dans le marketing et la communication
Le storytelling, le fer de lance de votre stratégie
Pour les marques, le message est clair : concentrez-vous sur la création de liens authentiques. Pour y parvenir, un storytelling qui s’attache à respecter les intérêts de votre audience niche sera votre meilleur allié. Mais surtout, ce storytelling doit être d’une réelle utilité. Laissez place à la sincérité, la transparence et l’empathie avec vos communautés plutôt que de faire la promotion de vos produits et services. On revient souvent aux mêmes discours : la qualité (valeur) plutôt que la quantité (volume).
Du côté des métriques, l’approche est la même. Focalisez-vous sur la croissance de vos abonnés, les visites répétées, le temps passé sur le site… Tout ce qui laisse entendre que votre audience est fidèle et engagée, et attachez moins d’importance aux clics (souvent furtifs). Nourrissez également leur besoins d’appartenance et leur besoin d’expression : écoutez (vraiment) votre audience, questionnez-la, considérez-la et proposez des contenus et produits en conséquence.
Le paradigme du “web douillet” démontre une valeur commerciale durable en améliorant le bien-être collectif des utilisateurs. Bien que les métriques comptent toujours, il faut les re-calibrer pour mesurer la qualité de l’attention plutôt que la quantité. La croissance des abonnés, les visites répétées, le temps passé sur le site et l’activité des forums signalent des communautés engagées. Aidez les audiences à ralentir. Bâtir la confiance prend du temps !
La montée en puissance de la nano-influence
Confiance et authenticité caractérisent également la nano-influence. Dans ce paysage fragmenté, on assiste en effet à l’essor des micros et nano-influenceurs. Contrairement aux macro-influenceurs qui s’adressent à des millions de followers, les nano-influenceurs cultivent des communautés plus restreintes, mais fortement engagées. Leur force réside dans l’authenticité de leurs relations avec leurs abonnés et leur expertise dans des domaines de niche. Et en plus, ils sont bien plus accessibles pour les marques que les influenceurs traditionnels.
Cette tendance illustre parfaitement le désir croissant des internautes pour des interactions plus personnelles et spécialisées, loin du tapage médiatique des grandes stars d’Instagram ou de TikTok… Même si cette approche continue de séduire certains.
Pour reprendre les propos du journaliste Ryan Broderick, nous entrons dans une période de » Web vaporeux « , c’est-à-dire que malgré l’omniprésence d’Internet dans nos vies, il devient de plus en plus difficile de saisir ce qui s’y passe réellement. Le boom récent des créateurs de contenus n’a de cesse de renforcer ce sentiment.
L’infobésité a eu raison de nous, elle nous détourne des fondements même des réseaux sociaux, à savoir créer du lien. A la place, nous nous replions. La façon dont nous consommons et partageons l’information en ligne est incontestablement différente. Néanmoins, affirmer que les espaces restreints, supposés plus sûrs et authentiques, sont davantage raisonnables restent une chimère. Les risques sont bel et bien là : la fragmentation de l’espace en ligne pourrait nourrir la polarisation et limiter notre capacité à construire un dialogue commun.
L’avenir du web social se jouera donc probablement dans notre capacité à trouver un équilibre entre le besoin de connexions authentiques et la nécessité de maintenir des espaces de dialogue ouverts et diversifiés. Rendez-vous dans deux décennies (voire moins !) pour une nouvelle introspection des réseaux sociaux 😉
Sources :
Pour les réseaux sociaux, la fin d’un règne ? Le Monde
The Rise of the Cozy Web – Medium
Pourquoi l’UGC nano-influence fait-il le bonheur des marques ? – Agence Redwood
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